densité rêvée

« Par les chemins anéantis nous ne cessons d’aller. »
Paul Celan


prolonger par un nouveau texte : rives d’hiver sous la poussée des paumes

Pour autrement y voir, la nuit

Des objets minéraux, illuminés

Un exil provisoire, sa géométrie latente, ellipse et blanc résorbés dans la disparité de la pierre : vains édifices, labyrinthes, mers vibrant dans leur claustration, ou prunelles de gibier, ternes

Tendus entre la mort et ses perspectives de filons, de presse : choses du sommeil recrues de terre, dédales, clarté d’étiage sous le ciel voilé, affleurement des matériaux du fond, qui chavirent sans mouvement, à distance fragile, friable : polygones secs, limons à larves, mues

Souche dans le sillon, ouverte

Estuaires

Boues

Nous avons d’éphémères terroirs, schématiques, effaçables

Sans rôle ni partition, juste dispensés de leur résonance, mais visibles : lézardes, écume, nuages, plumes, éponges, flocons, limaille : ces données immédiates d’un vertige de stries, d’un foisonnement d’alvéoles, quinconces et arêtes, cercles, moulinant leur chaos d’attracteurs comme l’on chante, bouche close, un jour de grand vent dans une plaine nue

Fonction monotone Dépeuplée Strictement monotone par morceaux et détachée, continûment dérivable : nos visages sous la vitre, leur mutilation, au moment foudre et sans suite de l’espace amoureux, de sa flaque variable : une encre visqueuse, glaire de mémoire, trace : on entend le clapotis des conjonctions, des scissions, des passages, de ces vies dans le foyer des lèvres, en suspens, le plus petit pli vacillant au moment de parler

Appui dos par les sons, les odeurs, la fuite du monde

Côté jardin grisé de forces, dissipation : onde véhémente, accumulant avec calme des mots éreintés, empêchés, des controverses Dénuement limite, épaules basses longtemps près de l’eau, épines et veinules circulant à l’aise dans le quartz bombé, charnu Pensées, herbes et feuilles brassées, vase remuée où viennent les questions, instances brutes du hâtif commun, répété, névralgique : l’horizon fait défaut si loin Trop loin pour y voir autrement, la nuit, à la périphérie débordée : les points de butée ou de rebond, le bruit de la mer qui descend, la terrible substance de la réalité, même les draps saignés à blancs, vidés Moteur immobile Terre à deuil rugueuse, la croûte qui retient Qui donne, et dénie muettement, en pure perte

Densité rêvée, la pierre dans la paume : où cela joue des interstices, des marges, des reports, des lumières

Entre murs et rebuts, et grilles, juste ce qu’il faut pour y voir autrement, la nuit


LES MOTS-CLÉS :

© Michèle Dujardin
1ère mise en ligne et dernière modification le 13 mai 2018
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