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MICHÈLE DUJARDIN, LES LIVRES       
Michèle Dujardin | Soir, nuit
«Au loin, sur le mur : écriture d’écailles, de fissures : originaire du soir elle ligne, mais sans rigueur, les contours d’un malaise expansif : elle élude et élide, principalement. Et ne dit rien que je ne sache déjà : que le soir est ici pour toujours, qu’il pleuvra demain, que l’effritement, progressif, est réel, et aussi qu’à la fin les plus belles fractales fatiguent dans ce dédale d’ennui. Et même, qu’il y a cette présence, où il ne vient heureusement rien. Tout le séparé je le porte le soir, dans les petits glaçons de fer, leur tintement sur la route.»
• commandes US/QC & autres monde
• chez Tiers Livre Editeur, septembre 2017

Michèle Dujardin | Blockhaus
«Ils dormaient, ventres de mort, fleurs de la guerre, intacts, bâtis de peur et de haine, avec des hurlements retenus dans leur intraversable compacité. Du solide : ils dureraient toujours. Et même la terre mouvante qui les avalait peu à peu, comme le montrait la déclivité douce du sol, ne les réduirait jamais en poussière ; au fond, au fil des eaux sableuses, le blockhaus glisserait inattaqué jusqu’à la fin du monde. Elle pensa, en s’asseyant sur les débris de l’ancienne tourelle, qu’ici, dans le blockhaus seulement, elle serait protégée de toutes les guerres à venir, retenue, maintenue sur terre par l’épaisseur de ces murs granuleux coulés sur les armatures de fer, et sa chute enfin, dans le vide où s’émiettent les pensées, où le corps se désassemble comme un corps de noyé serait là définitivement, miraculeusement arrêtée, stoppée net : elle serait sauvée.» Premier livre de Michèle Dujardin, «Blockhaus» a été publié aux éditions Jeanne Laffitte en 1983. Edition entièrement reprise et révisée par l'auteur.
• commandes US/QC & autres monde
• chez Tiers Livre Editeur, mars 2017

Michèle Dujardin | abadon
Si l’écriture a sa source, ça pourrait bien être là, entre chien et loup, à l’intersection indémêlable où la charge du jour nous est laissée sur les bras, avec nécessité malgré ce poids qui nous déséquilibre, de négocier au mieux l’arrivée de la nuit : tangage et vertige, sans respirer, comme une marche inconcevable sur le dos de la mer et qui dure jusqu’aux premières lumières. Espace difficile, équivoque et trompeur, toujours sous condition d’alarme et de ravissement ; et pourtant propice à un dire qui a si peu de lieux. L’occasion est furtive, à saisir, donnée toute simple par la mort des couleurs, l’effritement progressif des phrases, leur prêt-à-parler assourdi qui se délite, tombe dans le silence, et l’étourdissement léger, l’oscillation de tout l’être et l’inutilité du moment, détaché, sans emploi : reste alors un vide si on l’accueille, comme une plage. On y a froid, on y est seul. Et c’est beaucoup de sable. Mais l’inquiétude y fait lever des oiseaux que l’on n’attendait pas.
• commandes US/QC & autres monde
• aux éditions du Seuil, 2008.